1.1. Material Girl, Demonstration ! - Tu sais ! La beauté intérieure compte ! répondit avec véhémence une des filles de l’université qui déteste profondément la jeune Tatyana. Celle-ci ignore royalement, continuant à mettre soigneusement du mascara sur ses cils.
- La jalousie vous rend encore plus hideuse. Vous l’êtes déjà bien assez, arrêtez donc de vous faire du mal, soupira la Russe sans une once de sympathie, ou de moquerie. Elle était terriblement sincère.
- Nous ne sommes pas jalouses ! Et puis ! On n’est jamais éternellement belle, Tatyana ! Les hommes se fichent de ça ! C’est parce que tu es égoïste, et matérielle, qu’aucun homme ne reste avec toi. La jeune Tatyana cachait sublimement sa colère. Pourtant, elle était là, scintillant froidement au fond de ses prunelles. Cette lueur, hormis son père, et Stan, personne ne pouvait réellement la déceler. Ses gestes soudainement méthodiques, voire presque robotiques, étaient un autre présage que personne – hormis les deux personnes citées ci-dessus – n’interprétait.
- Sais-tu la différence entre toi et moi ? Quand je serais vieille, je pourrais dire à mes petits-enfants « quand j’étais jeune, j’étais belle ». Alors que vous, vous n’aurez rien à dire si ce n’est « quand j’étais jeune, j’étais jeune ». Jeune et moche, vieille et moche … La mocheté ne vous quitte malheureusement pas. Alors que moi, je l’ai vécu au moins quelques années. Allez, au plaisir de re-discuter avec vous, dit-elle en offrant un sourire radieux et sublime.
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1.2. Material Girl, Origine ! - Alors, acceptes-tu de disparaître de la vie de ma fille, en échange de ces diamants ? demanda la voix de son grave d’un homme d’âge mur à un homme bien plus jeune que lui.
- Oui, monsieur, jura sincèrement le crédule jeune homme.
Il ne savait pas qu’à son insu, cette scène était filmée, et directement retransmit sur un écran dans une pièce de ce grand manoir russe. Face à cet écran, une Rousse regardait silencieusement ce qui s’apparentait à un film d’horreur pour elle : celui qui disait l’aimer qui l’abandonnait aux premiers brillants d’un morceau de pierre. Cependant, il n’était pas le premier, et il n’allait sûrement pas être le dernier. Depuis qu’elle savait « aimer », son père n’avait pas cessé de démontrer à quel point l’amour était un sentiment vain. L’accord était simple dès lors : il allait faire une proposition alléchante au jeune homme qui prétendait l’aimer, et s’il cédait, elle aura à l’abandonner, preuve qu’il n’est qu’un fanfaron et non le grand amour. Que ce soit à seize ans, ou à vingt ans, rien ne changeait : tous l’avaient jeté sans ciller devant les diamants.
- Alors ma fille, que dis-tu ? demanda soudainement le vieil homme en se retournant vers la caméra cachée.
- Les diamants sont les meilleurs amis des jeunes filles… répondra-t-elle ironiquement.
Après de nombreux échecs, et faux-espoir, elle avait abandonné tout espoir du grand Amour vers l’âge de vingt-quatre ans, et avait compris que ce monde était régi par la Matérialité. Et être sain dans un monde de fou était folie, alors elle s’est naturellement fondue dans le moule. Elle ne jure que par les marques de luxe, et par la beauté superficielle. Elle vous rit au nez si vous dites que la beauté intérieure est importante. SA réponse sera assez concise, rejoignant ce personnage de « Neon Demon » : « Si ta copine n’était pas belle, tu ne te serais même pas retournée pour la regarder. L’invisible est stupide, le brillant enflamme ».
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2. Best-friends
- Pourquoi vous retirez-vous seuls ? demanda son père abruptement aux deux jeunes adolescents qui montaient jusqu’à une chambre, en riant d’une façon insolente.
- Nous allons nous aimer ! répondit avec insolence la rousse qui menait la danse.
Le père devint rouge tomate. Cependant, sa femme vint très vite à la rescousse, disant qu’il devait se calmer, et qu’elle devait « sûrement » rire. C’était très inconvenant de faire une telle chose dans une maison parentale, avec les parents autour … sans parler qu’ils étaient amis d’enfance. Ils sont habitués à se retrouver seuls. Que les parents étaient naïfs, notamment au sujet de Tatyana. Tatyana était celle qui introduisait le duo aux pires bêtises, et c’était Stanislas qui les poussait à leur extrême.
Ils étaient jeunes adultes, ils avaient appris récemment cette folle histoire qu’ils « avaient » été fiancé à leur « naissance ». Enervée, elle avait dit ne pas vouloir d’une telle alliance. Les Vadislov’ n’ont guère apprécié, et ils n’ont pas cessé d’exiger une tenue convenable, qui sied à une jeune fille de son rang. C’était par goût de ce scandale, cette envie de regarder droit dans leur yeux en sachant pertinemment qu’elle avait commis x et y bêtises sous leur nez qu’elle avait attiré Stan dans ses bras, qu’elle y avait déposé des baisers enflammés tout le long de son corps, qu’elle s’était mise à nue devant lui et qu’ils avaient fait l’amour aussi silencieusement qu’ils pouvaient, Tatyana ne pouvant s’empêcher de se sentir victorieuse.
L’affaire aurait pu s’arrêter là. Ils auraient pu continuer à être amis, ou simples amants, mais c’était sans compter sur Stan qui parlait BDSM. Qui parlait Club. Qui vendait Drogue. Elle se laissait tenter une fois ou deux, mais jamais trop. Ce n’était pas vraiment ses « délires ». Par contre, cela ne changeait rien à leur relation : elle continuait à être la meilleure amie, celle qui conseillait sur l’aspect logistique ou légal de son entreprise de revente de drogue, ou encore sur son club – notamment sur une affaire de look des filles pour donner plus envie aux hommes de venir. La demoiselle était après tout la fille d’un homme d’affaires spécialisé dans le transport, et avait en poche un double-diplôme américain alliant droit et commerce. Ajoutons à cela qu’étant fille d’une mannequin russe, elle connaissait pas mal de chose à la mode.
Un pied à terre dans le show-bizz, un autre dans les affaires, voire même la politique du côté du grand-père maternel ancien politicien, et encore un pied dans la « criminalité » avec Stan, elle était littéralement le couteau-suisse de la bande. Intègre, sans totalement l’être, poussé à ses limites encore et toujours par cet ami d’enfance. Car oui, elle peut soumettre des idées, mais en terme d’actions – ou de prises de risque -, Stan était le meilleur pour pousser la demoiselle jusqu’au bout. Jamais elle n’oserait seule. Un bon duo, quel que soit la thématique, ou l’affaire. Un dangereux duo, dirions-nous.
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3.1. She can fear, Demonstration !Un homme dans la rue s’était enflammé, et enhardi, et tapota vulgairement les fesses de Tatyana qui passait par là, comme une furie, énervée que son chauffeur lui ait fait faux-bond avec ce pneu éclaté ! Son amie, qui était tout le contraire de la jeune femme, tentait de l’apaiser en riant. Cependant, cette dernière se tut en lançant de gros regards au pauvre garçon, le type de regard qui disait « fuit ».
- Tu viens de me toucher les fesses ? interpella la Rousse soudainement.
- T’es trop bonne mademoiselle !
- Evidemment que je le suis. Et tu ne l’es pas, soupira-t-elle devant l’idiotie du garçon.
T’ai-je autorisé à me toucher les fesses ? L’inconnu riait, ne prenant pas la furie au sérieux.
- Personne ne me touche sans mon autorisation, indiqua-t-elle.
Sinon, je m’énerve. Elle avait profité de l’inattention de l’inconnu des rues pour sortir une bombe aux poivres et en balancer une bonne dose droit dans les yeux de ce garçon. Aussitôt après, elle s’empara de son éternel parapluie caché au fin fond de son sac pour l’écraser violemment dans l’entre-jambe de son « agresseur », puis directement sur son crâne, l’assommant brutalement.
- Je m’appelle Vadislova Tatyana, et personne ne me touche sans mon autorisation. Vous avez compris ? Qui je suis ? demanda Tatyana aux groupuscules d’amis du garçon assommé.
- Vadi…Vadislova Taty…Tatyana, finit par dire l’un. La peur devenait que plus importante quand il vit la manche d’un petit pistolet dépasser le sac de la rouquine.
- Tu as compris. Tu peux déposer un petit baiser sur ma main. La dite main était évidemment gantée, et quand à la suggestion, cela tenait davantage à un ordre. Par ce geste, elle s’ancrait dans les esprits. Comme la femme forte. Comme la femme à ne pas embêter.
- Tu n’as peur de rien, Tatyana ?
- Evidemment que non, mentit habilement la jeune femme.
Evidemment que oui. Tout le monde avait ses peurs.
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3.2. She can fear, Origine ! - Nous allons nous amuser, Tatyana, je te promets, promis un type qui l’avait enfermé dans une pièce froide et noire, avec des caméras un tantinet partout.
L’affaire était abominablement simple. Ce type avait profité de la dernière soirée américaine de la jeune fille – elle fêtait l’obtention de son diplôme américain, et préparait son grand retour en Russie-, pour la kidnapper. La suite, il n’y avait guère à en parler. Sachez seulement que cette épisode de sa vie que personne ne connaissait avait entrainé deux grandes phobies : la claustrophobie, ou encore toute présence masculine un tantinet trop intime dans le noir complet. Voire le noir complet. Ces deux situations la ramenaient indéniablement à son tortionnaire. Ne lui demandez pas comment elle s'en est sortie : elle n'a nulle idée. Elle n'a nul souvenir, dirions-nous.
Le vieux couple qui passait sur l'autoroute vous diront sûrement qu'ils avaient retrouvé une pauvre jeune femme de vingt-cinq ans, marcher sans hâte et béatement sur le rebord de la route, tuméfiée de partout - exceptée le visage - avec des cicatrices de-ci de-là. Encore aujourd'hui, elle garderait certaines traces, qui la rendent bien hideuses pour elle. Qui la renvoient à une époque qu'elle souhaite oublier. Mais elle avait eu raison sur un point il y a longtemps : au moins, elle avait le luxe de pouvoir "j'étais belle, quand j'étais jeune". Sauf qu'elle dira davantage "j'étais belle, avant" dorénavant.
Ce même vieux couple vous dira "elle a disparu au petit matin". Pendant un an, on ne sait pas exactement ce qu'elle a fait, ou vécu. Elle a seulement passé un coup de fil, le jour de ses vingt-six ans, demandant à revenir en Russie. Loin de la retrouver à moitié folle, ou droguée, elle respirait ... force. Et Ambition. Beaucoup se sont leurrés, prétendant s'être inquiétés pour rien, se disant que Tatyana avait eu juste une lubie d'un an et une semaine.
Ses parents ne savent rien, ni Stan. Il avait déjà passé un séjour en prison en raison de sa sœur. Elle se refusait qu'il entame une quelconque folie par sa faute. C'était par ailleurs pour lui qu'elle était revenue. Il avait été le seul avec qui elle avait gardé contact durant cette année sabatique, le seul qui lui disait "reviens, ou je te ramène moi-même". Et elle ne voulait pas. Elle ne voulait pas revenir plus tôt et exploser en larme devant lui. Elle ne voulait pas non plus qu'il vienne car elle n'était pas prête. Alors, comme un détenu condamné à mort, elle tentait de repousser l'échéance en demandant un dernier verre d'eau.
"Encore un jour, encore un et promis je reviens". Personne ne savait rien de cet événement, hormis elle.
Personne ne savait rien de ses peurs, hormis ses amants qui partageaient ses nuits, témoins de ses cicatrices ou encore de ses exigences ou encore de ses réveils subits.
Mais personne ne disait rien : les secrets d'une femme ne doivent être dévoilés que par elles, après tout.